Sensibiliser au respect de l’environnement et de l’humain en produisant des œuvres, c’est la voie que choisissent de plus en plus d’autrices et d’auteurs. Dans le cas de Lucie Rico, autrice du Chant du poulet sous vide (éditions P.O.L, 2020), ce n’était peut-être pas l’intention première, mais la romancière considère avec du recul que son livre, lauréat du Prix du roman d’écologie en 2021, est « un roman d’écologie en ce qu’il questionne les normes de langage du capitalisme et du marketing ; les évidences dans notre rapport à l’animal. » Elle précise également son envie « de laisser la place centrale de [son] livre aux animaux, d’en faire de vrais personnages, pour renverser les normes auxquels nous sommes habitués » ainsi que « d’élargir le regard et questionner le lecteur sur le vivant. »
Autre facteur de pratique et de réflexion sur l’écologie : la collaboration entre artistes de champs créatifs différents peut engendrer des synergies. Une résidence expérimentale a eu lieu en mai 2022 durant une semaine au Chalet Mauriac, à Saint-Symphorien (33), au cœur du massif forestier landais. Organisé conjointement par les trois agences culturelles de Nouvelle-Aquitaine réunies au sein de la MÉCA – ALCA, FRAC et OARA –, ce temps inédit de réflexion et de création a rassemblé la photographe Morvarid K, l’auteur et réalisateur Geoffrey Lachassagne et la plasticienne Sarah Trouche. La pluridisciplinarité des trois artistes en présence a sans doute favorisé l’interpénétration de leurs travaux. Ainsi, Geoffrey Lachassagne a été influencé dans sa réflexion par les approches de ses deux corésidentes : « Nous avons exploré ensemble des alternatives. Les réalisations de Morvarid et de Sarah m’ont renvoyé à l’idée que la destruction des espèces et de notre écosystème est aussi celle d’une part de nous-mêmes. »
Étant à la source de la création littéraire, les autrices et auteurs sont elles-mêmes et eux-mêmes confronté·es aux questions écologiques qu’induit leur travail. Le polygraphe normand Nicolas Sorel, bien qu’il reconnaisse une « surproduction » de livres, alerte pour sa part sur « une attention particulière […] à préserver la circulation des idées ». Dans une interview accordée à Perluète, il explique que « dans l’urgence, on a parfois tendance à jeter le bébé avec l’eau du bain, or les œuvres sont des “produits” particuliers : il est ridicule de faire traverser le monde à des pantalons ou des légumes, auquel le voyage n’apporte rien ; les œuvres, elles, sont uniques, les idées et les pensées qu’elles véhiculent également. »
+ Sensibiliser
+ Expérimenter
+ Coopérer
+ Prolonger
+ Pour aller plus loin
– Normandie Livre & Lecture propose des catalogues de parutions thématiques, dont l’un présentant des ouvrages engagés ou simplement sur la nature, le paysage, etc.
– La Bibliothèque nationale de France, partenaire depuis 2019 du Prix du roman d’écologie, consacre à « L’écologie dans le roman d’aujourd’hui » une page de son site Internet. Celle-ci rassemble notamment les vidéos de la rencontre « L’écologie et la création artistique », faisant dialoguer Alice Ferney et Alexis Jenni, celles du cycle « Littérature et écologie » organisée en 2020, une bibliographie sur ce thème…